Aidant au quotidien
Témoignages de personnes aidées, d'aidants : familles, proches, professionnels - Beaucoup de sentiment de culpabilité des aidants
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Marguerite G.
Marguerite G., Paris. 93 ans, est atteinte d'une sclérose en plaques invalidante qui l'a rendue paraplégique. Elle est prise en charge à domicile par différents services d'aide à domicile depuis plusieurs années.Les soins infirmiers commencent à 9 h 15 et durent jusqu'à 10 h 30. L'aide soignante effectue une toilette au lit, pare à l'incontinence urinaire et pose enfin des bas de contention destinés à éviter une phlébite.
Marguerite G. est ensuite habillée et coiffée. Une infirmière arrive vers 9 heures et demie, prend la tension de Mme G., lui prépare ses médicaments de la journée, effectue les soins médicaux dont une injection sous-cutanée d'anticoagulant.
Ensuite, l'infirmière et l'aide soignante placent Marguerite G. dans son fauteuil en s'aidant d'un soulève malade. Elles l'installent dans la salle à manger avec, à proximité, un verre d'eau, le boîtier de la téléalarme, le téléphone, le journal, la télécommande de la porte et celle de la télévision. Ces deux personnes décrivent leur intervention sur le cahier de coordination en notant leurs soins et leurs remarques pour les autres intervenants.
A midi, une aide ménagère vient faire les courses, un peu de ménage et préparer le repas.
A 17 heures, l'aide soignante repasse au domicile de Marguerite G. pour son coucher. Elle lui fait une petite toilette, retire les bas de contention, lui passe sa chemise de nuit et une protection urinaire, l'installe au lit et réorganise le matériel utile pour la nuit, un verre d'eau, la télécommande. Elle dépose sur la table de lit le repas du soir préparé par l'aide ménagère. L'aide soignante note à nouveau les consignes et ses remarques.
Si Marguerite G. doit être hospitalisée en urgence, les membres du réseau constitué autour d'elle en sont informés rapidement. Marguerite G. n'aura pas perdu le contact et le réseau se reformera sitôt sa sortie de l'hôpital.
Marie F.
Marie F., 50 ans, fréquente pour la première fois de sa vie un psychologue. Elle y va pour calmer l'angoisse et la souffrance d'être seule responsable de sa mère âgée de 87 ans :
" Sur quatre frères et soeurs, c'est moi qui ai été volontaire pour m'occuper de maman et vivre avec elle à la mort de mon père. J'ai toujours été la plus proche de mes parents, je les ai aidés au plan financier, j'étais la plus disponible et j'ai toujours pensé que je réussirais à concilier ma vie personnelle et ma vie avec mes parents. Je m'en sentais capable au plan psychologique, financier et moral.
C'était une lourde erreur. Je me suis abusée moi-même. J'ai habitué mes frères et soeurs à être là et, du coup, ils se déresponsabilisent. Je suis profondément déçue."
Marie vit aujourd'hui avec "un énorme sentiment de frustration vis-à-vis de ses frères et soeurs". Et de conclure aussitôt : " C'est le problème des célibataires et surtout des femmes célibataires. Elles sont disponibles. Le gardiennage des parents âgés retombe automatiquement sur elles. Le plus drôle c'est que j'ai été la plus insouciante. Je sortais dans les boîtes à la mode, j'avais plein de petits copains, certains m'ont même proposé le mariage, j'avais de l'argent... bref, je voyais la vie comme un rêve. En tant qu'hôtesse de l'air, je voyageais pas mal, je vivais dans les grands hôtels... Mais derrière cette vie apparemment dissolue, je suis restée fidèle au milieu familial. Je n'ai jamais voulu m'engager avec un homme et, dès qu'une relation durait, elle m'inquiétait."
Ayant préféré la sécurité du milieu familial au danger d'une relation amoureuse de long terme, Marie a aussi préféré rester fille que devenir mère. "Je réalise aujourd'hui que le milieu familial est un piège et qu'il ne me convient pas. Je regrette aujourd'hui de ne pas avoir épousé l'un de ceux qui m'ont proposé le mariage. Si j'avais accepté, j'aurais pu m'occuper de ma mère à distance, mieux même que je ne le fais maintenant."
Véronique D.
Véronique D. 44 ans. Sans l'avoir voulu, presque sous la contrainte, cette jeune femme est devenue le nouvel "homme fort" de la famille.
"Mon père est mort il y a huit ans. Ma mère est donc devenue veuve. Elle n'avait jamais travaillé de sa vie, elle ne savait pas faire un chèque, ni gérer un budget, et encore moins régler une facture. Mon père lui donnait de l'argent tous les mois et elle devait se débrouiller avec. Souvent elle se plaignait : " Je ne sais jamais combien d'argent on a", et régulièrement mon père lui répondait "Viens, on prend une heure et je t'explique". Mais cette explication n'avait jamais lieu. Je sais maintenant que c'était ma mère qui la refusait. Ça ne l'intéressait pas. Elle se plaignait de son ignorance pour la forme.
Ce qu'elle voulait surtout c'était être prise en charge. Elle n'a jamais pris le train toute seule, n'a jamais souhaité le prendre mais aimait s'en plaindre et reprocher à mon père d'avoir bridé son autonomie toute sa vie. "Ton père n'a jamais voulu", répétait-elle sans cesse. En réalité, elle trouvait très confortable d'être assistée. Et aujourd'hui encore, elle résiste à prendre le train toute seule. Il faut que mon mari aille la chercher en voiture dans la Marne où elle réside et perde une demi-journée pour lui éviter la panique de prendre le train toute seule.
Quand mon père est mort, ça a été l'anéantissement... Elle disait qu'elle n'arriverait jamais à vivre toute seule. Et moi, outre ma douleur, il fallait que je m'occupe d'elle, et ça se traduisait pardes engueulades. Je lui disais : "Tu n'es pas la première à qui ça arrive... ". Mais elle n'entendait rien. C'est moi qui ai dû prendre en charge les obsèques. J'avais 30 ans et je devais gérer une femme de 70 ans. J'ai été aidée par un cousin qui s'est occupé du règlement de la succession et des affaires de mon père. Mais je subissais de plein fouet la pression de toute la famille qui me susurrait à chaque seconde : "Il faut que tu sois forte pour ta mère." Et tout le monde m'interdisait de montrer un signe de faiblesse. Un an après, j'étais en thérapie."
Brigitte D.
Brigitte. D. 52 ans."J'ai appelé mon frère et je lui ai demandé un rendez-vous. Lorsqu'il est arrivé, je lui ai jeté à la figure que ma mère était aussi sa mère et qu'il ne pouvait se désintéresser totalement de la situation. Il a été surpris je crois par la violence de mes paroles. Et il a proposé de l'argent pour rémunérer une aide extérieure. J'ai fait un effort surhumain pour garder mon calme. J'ai dit que je regrettais que nous en soyons arrivés à ce degré d'incompréhension et que j'étais responsable aussi sans doute de la situation.
J'ai expliqué que j'étais épuisée nerveusement, que j'avais cru pouvoir régler la situation toute seule mais que la dépression profonde de notre mère risquait de me gagner à mon tour si rien n'était fait. J'ai vu alors son regard changer. J'ai su que je l'avais touché. Et nous avons eu pour la première fois une vraie conversation sur notre avenir familial."
Depuis 1993, ma mère passe sa vie entre le lit et le fauteuil. Elle a été victime de deux AVC (accident vasculaire cérébral) qui l'ont laissée handicapée. Elle a l'esprit vif et la réplique facile, mais elle est paralysée des jambes et ne peut plus se déplacer. Elle passe ses journées dans un fauteuil à roulettes.
Elle souffre aussi de cataracte - les médecins hésitent à opérer -, entend seulement d'une oreille et l'une de ses cloisons nasales devrait être refaite pour faciliter la respiration.
Cela fait huit ans que ma mère ne sort plus de chez elle. Une coiffeuse et un pédicure passent régulièrement, un kiné torture quotidiennement son vieux corps noué afin qu'elle ne courbe trop le nez sur les genoux. Et une infirmière vient tous les jours faire sa toilette et la porter du lit au fauteuil le matin, et du fauteuil au lit le soir.
Mais au moment des vacances, il y a du flottement, et parfois elles oublient de venir.
De mon côté, je ne m 'échappe de l'appartement que pour faire les courses. Je ne m'attarde guère à l'extérieur car ma mère est victime de fortes crises d'angoisse sitôt seule. Le médecin m' a pourtant recommandé de prendre l'air au moins deux heures par jour car l'absence d'exercice physique m'expose à un accident cardiaque. Mais pour ne pas angoisser ma mère, j 'ai renoncé à toute promenade.
Je fais tous les jours le ménage à fond : c'est mon seul exercice physique. Mes seules distractions proviennent de la messe que j'anime de manière très irrégulière dans une paroisse du 18e arrondissement de Paris, et d'une autre à laquelle je participe non moins irrégulièrement, dans un centre pour handicapés de grande banlieue. Je paye quelqu'un pour tenir compagnie à ma mère et pouvoir m'échapper. Je m'éclate quand j'anime la messe. On ne demande pas à un artiste s'il en a marre de chanter. Moi c'est pareil, je suis heureux d'apporter cet entrain, je n'en ai jamais assez.
Cette réclusion qui est la mienne m 'a fait perdre 8 kilos mais grâce à un traitement médical, j'ai repris 3 kilos. Je n'ai quasiment aucun contact avec l'extérieur, si ce n'est la télévision. Il y a bien quelques cousins qui téléphonent de province pour prendre des nouvelles, mais qu'est-ce que vous voulez que je leur dise ? Je suis très découragé."
Gilles C.
Gilles C., employé de banque, a encore ses parents. Son père est âgé mais valide. Sa mère a la maladie d'Alzheimer. Le couple partage un appartement à Paris.
"Pendant des années, avec ma soeur unique on ne s'est appuyés sur aucune institution. Ce n'est pas faute d'avoir essayé. Les associations d'aide à domicile auxquelles nous avons fait appel ont été plus que décevantes. Elles n'étaient pas sérieuses. Les personnes qu'elles nous ont envoyées n'avaient aucune formation. La plupart des candidates étaient en situation difficile (mère célibataire, chômage de longue durée...), alors qu'on ne s'improvise pas garde malade. Ce n'est pas un "petit boulot".
Il faut savoir gérer une fugue, les cris, les hurlements, la colère, la violence, le refus de manger de lapersonne dont on a la garde.
Des trois associations auxquelles nous avons fait appel, une seule paraissait sérieuse. Mais outre qu'elle était chère, nous étions les employeurs, juridiquement responsables, de personnes dont le recrutement nous échappait en grande partie. Inadmissible.
Par ailleurs, ces associations ne sont pas capables de réagir dans l'urgence. Lorsque mon père a été hospitalisé, elles ont été dans l'incapacité de nous fournir une jeune femme rapidement. Je leur reproche aussi une autre chose : lorsque mes parents rentraient de vacances, ils ne retrouvaient pas la même aide. L'idéal est ce qu'on appelait naguère une gouvernante."
En faisant jouer nos propres réseaux de connaissances à Paris, ma soeur et moi avons constituéune équipe de trois personnes qui se relaient dans l'appartement de mes parents (mon père vient d'être opéré d'un cancer ; ma mère est très âgée) : l'une vient pendant la journée, l'autre le week-end (il ne doit pas s'agir de la même), une troisième assure les gardes de nuit. Enfin, une quatrième est disponible, encas de défection d'une des trois autres.
Au départ, mes parents, mon père en particulier, récusaient l'aide d'une personne extérieure. L'intrusion d'une étrangère, ils n'en voulaient pas. Lorsque mon père a été hospitalisé, ma mère (elle n'avait pas la maladie d'Alzheimer à l'époque) venait lui rendre visite escortée de l'une des trois " accompagnatrices". C'est ainsi qu'il a été apprivoisé et qu'il a changé d'avis.
Mes accompagnatrices, je leur demande d'être à l'heure - pour ne pas gêner les autres -, de s'entendre bien entre elles, et d'occuper avec discrétion mais efficacité un espace intime - l'appartement de mes parents - qui ne leur appartient pas.
Le règlement implicite que nous avons instauré tient en quelques lignes :
- arriver à l'heure,
- préparer de vrais repas, et les servir à mes parents aux heures habituelles,
- sortir ma mère chaque jour, même cinq minutes,
- converser avec elle, même quelques minutes,
- lui laisser un espace de liberté,
- ne pas la négliger (elle doit toujours porter des vêtements propres)."
Thomas D.
Thomas D., 48 ans, Paris." Lorsque, il y a deux ans, ma mère a quitté le centre psychiatrique où elle venait de passer plusieurs mois après une grave dépression, nous avons décidé, en famille, de réunir mes parents, de les faire revivre ensemble dans leur appartement parisien. Mais de le faire en leur adjoignant des aides.
Au total, il y avait cinq personnes pour s'occuper d'eux en se relayant. Une véritable PME. Trois personnes qui se complétaient à raison de 5 jours pour chacune d'entre elles, 24 heures sur 24 ; une quatrième pour la période des vacances ; et une cinquième pour la cuisine - une vieille femme employée dans notre famille depuis un quart de siècle. Nous les avons embauchées via l'association D.à Saint Denis, en région parisienne. On n'a pas eu à se plaindre du personnel. Il a fait son travail consciencieusement, alors qu'il n'était pas formé pour ça - la plupart des personnes avaient auparavant un vrai boulot, du genre secrétaire, mais elles l'avaient perdu et étaient au chômage. Mes parents étaient l'employeur officiel même si les bulletins de salaire étaient rédigés par l'association. C'est une solution coûteuse pour un métier difficile.
Dieu merci, avec près de 60 000 francs de retraite mensuelle, mon père, un ancien polytechnicien, pouvait en consacrer près de la moitié à payer ses auxiliaires de vie. La personne qui a été embauchée la première, une femme de 35 ans, du genre "psychorigide", s'entendait très bien avec mon père. Je le soupçonne d'avoir été amoureux d'elle. Comme lui, elle détestait qu'une casserole ne soit pas rangée. Elle est restée trois ans.
Nous avons dû licencier une des personnes que l'association nous avait proposées parce que cette femme ne s'entendait pas avec elle. "C'est elle ou moi", nous a-t-elle dit. Après le décès de mon père, nous ne l'avons pas gardée. Aujourd'hui, c'est avec elle que nous sommes en procès. Ma mère la détestait. Elle disait qu'elle ne voulait pas rester seule avec une étrangère."
Diviser pour régner : Jean-Pierre 48 ans, musicien, et Agnès, 45 ans, agent de voyage
- Jean-Pierre et Agnès se sont aperçus que leur mère se comportait différemment selon qu'elle avait affaire à l'un ou à l'autre de ses enfants. "Face à moi, ma mère me faisait l'effet d'être un vaillant petit soldat. Elle me laissait entendre qu'elle traversait l'enfer mais ne le montrait jamais ouvertement. Elle donnait le sentiment de prendre sur elle et de souffrir en silence, ce que j'admirais du fond du coeur", confie Jean-Pierre.
- " Moi, raconte sa soeur Agnès, je l'appelais tous les jours et chaque fois j'avais le sentiment qu'une catastrophe était arrivée. Elle prenait une voix sifflante, les mots sortaient difficilement et même si elle disait que rien de particulier ne s'était produit, je sentais qu'il fallait que je passe chez elle. Bien entendu, quand j'arrivais je constatais qu'elle n'avait rien. Il m'est arrivé plusieurs fois de crier sur elle. A chaque fois, elle rétorquait que mon frère, "lui", était beaucoup plus gentil."
Danielle R.
Dissimuler ses difficultés : Danielle R., 40 ans
" Ma mère souffrait de troubles psychiques graves. Elle était victime d'hallucinations et se voyait entourée de bébés morts qui la terrorisaient. Parallèlement, elle développait divers délires de persécution qui l'amenaient à accuser tout le monde de toutes sortes de méfaits. Elle appelait régulièrement la police pourse plaindre qu'on voulait la tuer ; elle ne voulait plus se laver mais quand le médecin venait, elle jouait à la gentille grand-mère. La première fois qu'on est allé à l'hôpital Charles Foix, elle a réussi à duper le psychiatre avec une habileté et une finesse qui nous ont laissés pantois...
Ma mère n'était pas extrêmement intelligente mais dans la dissimulation de ses troubles psychiques, elle touchait au génie. Le psychiatre de l'hôpital l'a laissée partir et sitôt installée dans l'ambulance elle a recommencé à délirer. Une des gardes-malades qui s'occupait de ma mère a utilisé un jour un camescope pour qu'il y ait un témoignage. Le film a servi à prouver aux médecins qui délirait réellement."
Jeanne R.
Devenir l'enfant de son enfant : Jeanne R., fille unique, 50 ans
Certains enfants adultes sont consumés de culpabilité à l'idée qu'ils n'en font pas assez. C'est le cas de Jeanne. Outre son travail de documentaliste, elle fait chaque jour les courses pour sa mère, passe le matin l'embrasser et le soir lui préparer à dîner.
Jeanne est hantée par la conviction dévorante qu'elle devrait en faire plus. Elle aime sa frêle mère de 80 ans et lui est reconnaissante des sacrifices qu'elle a consentis pour son éducation. Jeanne croit au mythe du "remboursement total "et aimerait rendre à sa mère l'ensemble des bienfaits qu'elle estime lui devoir.
De son côté, la mère de Jeanne n'arrête pas de faire valoir qu'elle est de plus en plus âgée et de moins en moins résistante au plan physique comme au plan émotionnel. Jeanne, faut-il s'en étonner, est légèrement dépressive...
Léonard S.
Chantage affectif d'un parent : que faire ? Léonard S., enseignant, 47 ans
Léonard doit quotidiennement affronter une mère qui "a compris que j'avais besoin de vivre avec l'idée que je suis un bon fils. Alors, elle en profite. Pour elle je n'en fais jamais assez, je ne lui prête pas assez d'attention, je ne m'occupe pas assez d'elle... bref, je ne l'aime pas vraiment ".
Léonard appelle sa mère tous les jours mais, régulièrement, celle-ci lui laisse entendre que "s'il l'aimait vraiment ", il lui rendrait visite plus souvent". Quand elle voit "ce que les autres enfants font pour ses amies, elle n'a vraiment pas de chance ", affirme la mère de Léonard.
Pareilles critiques provoquent l'agacement filial mais sans pousser à la révolte. En revanche, la femme de Léonard ne supporte pas que cette vieille femme lui vole son mari, ce qui place ce fils attentif et ce mari aimant au centre d'un terrible conflit. Sa femme d'un côté, sa mère de l'autre.
Nos recommandations :
- poser des limites à son intervention ;
- travailler avec des professionnels (Clic, équipe médico-sociale de l'Apa) pour déterminer le plan d'aide le plus adapté à la situation de sa mère ;
- mettre en oeuvre le plan d'aide éventuel : aides à domicile, accueil temporaire, clubs...
- ouvrir l'accompagnement aux autres membres de l'entourage : voisins, amis ;
- échanger avec d'autres familles, aidants, voire des professionnels de l'écoute (psychologues, groupes de parole) sur ce vécu parfois difficile.
Catherine N.
Exagérer ses difficultés : Catherine N., 45 ans, expert-comptable
"Ma mère m'a fait des coups pendables. Elle m'a téléphoné un jour d'une voix mourante. Elle disait qu'elle allait mal et moi j'ai cru qu'elle était à l'agonie. Je n'avais donc qu'une seule chose à faire : laisser tomber mon travail et foncer la voir à M., à deux heures de voiture de Paris. Or je déteste conduire, l'autoroute me rend phobique, il faut quelqu'un à côté de moi. J'ai donc convaincu la voisine de m'accompagner.
Quand nous sommes arrivées, ma mère était dans le jardin tranquillement installée à prendre le thé. Quand on se parle au téléphone, elle articule lentement d'une voix toujours plaintive. Mais dès que je la branche sur un sujet qui l'intéresse, elle retrouve un ton normal. Pour ma mère, l'un de ses grands jeux consiste à faire croire qu'elle est malade. Ça lui donne un surcroît d'existence. C'est pour qu'on s'occupe d'elle."
Alexandre C.
Pratiquer l'égocentrisme : Alexandre C., 91 ans
" Chacun me dit que je devrais aller dans une maison de retraite. Mais en quoi ai-je besoin d'une maison de retraite ? Je vais bien, j'aime mon vieil appartement. J'ai de bons enfants - nous sommes une famille très unie - et ils sont heureux de me donner un petit coup de main de temps en temps."
Alexandre se garde bien de définir la nature du "petit coup de main", ni la fréquence du "temps en temps". Tous les jours, Emilie, 50 ans, passe voir si son père a pris son déjeuner et n'a pas mis le feu à l'appartement. Francine, 49 ans, sa seconde fille, s'occupe de toutes les courses et du nettoyage. Pierre, 47 ans, passe faire du bricolage et supervise la préparation du dîner.
En sus, une infirmière vient matin et soir faire la toilette et procéder aux cérémonies du lever et du coucher. Tous les enfants paraissent excédés de cette contrainte quotidienne qui est accrue le samedi et le dimanche. Mais nul n'ose rompre le contrat moral qui lie ensemble tous les membres d'une famille qui se veut solidaire.
Geneviève S.
Se dénigrer pour provoquer la compassion : Geneviève S., 48 ans
"Mais pourquoi vous encombrer d'un vieux (une vieille) comme moi ? Regardez-moi ces vieilles jambes qui ne peuvent même plus me porter... Non, non, partez en vacances tout seuls, je gâcherais votre plaisir..."
Henriette M., 87 ans, sait chaque été admirablement "convaincre" sa fille Geneviève et son gendre de l'emmener en vacances dans leur maison du Vaucluse. "Chaque fois, explique Geneviève, je ne peux m'empêcher de lui répondre : "Mais enfin, maman, comment peux-tu dire des choses pareilles ? Nous sommes très heureux de t'emmener avec nous en vacances. N'est-ce pas les enfants ?"
Corinne A.
Régner par la terreur : Corinne A.
"Mon grand-père (94 ans) souffre de "démence sénile". Il rend la vie de mes parents impossible en en se montrant terriblement autoritaire. Il leur manque de respect, exige d'eux qu'ils soient hyper disponibles et se fait passer pour un malheureux, quand à bout de nerfs, ma mère refuse d'être menée à la baguette par son beau-père.
Il est vrai que mon père a un mal fou à réagir, trop peiné par l'attitude de son père, qui le traite comme un enfant et a oublié tout le dévouement dont il a fait preuve. Résultat : mes parents sont très tendus à l'idée de la moindre rencontre. Leur appréhension va jusqu'à les empêcher de dormir. "
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