Approches non-médicamenteuses : la thérapie du voyage, ça fonctionne ? - Impacts sur la relation, les troubles du comportement
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Nous l’évoquions en 2016 : la thérapie du voyage débarquait en France pour apaiser l’anxiété et l’agitation de personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer. Depuis, cette approche non-médicamenteuse a été expérimentée et évaluée par le service de gériatrie du CHU d’Amiens.
Le premier voyage virtuel en train a eu lieu en Italie, en 2014. A la maison de repos San Gaetano, dans la ville de Caidate, un quai de gare et un wagon de train factices emmènent les résidents pour un voyage immobile de 15 à 45 minutes.
En guise de fenêtre, un grand écran diffuse les images d’un paysage qui défile.
Objectif ? Créer un lien de confiance entre les résidents utilisateurs et les professionnels, mais aussi apaiser les tensions.
Selon les référents du projet, Lodi Luca et Prete Orlando, cette « intervention thérapeutique non-médicamenteuse influence positivement le comportement, contribue à la détente et au bien-être sur le long terme. »
Plus spécifiquement, la thérapie du voyage permet, au niveau relationnel de :
- stimuler le dialogue (communications verbales/non verbales) et les capacités relationnelles
- faciliter l’expression des émotions
- stimuler la mémoire à long terme
- stimuler l’attention
- diminuer les troubles psycho-comportementaux
- faciliter la détente
- stimuler la mémoire procédurale
- prolonger l’état de bien-être une fois que la personne âgée est raccompagnée dans son cadre de vie
Le choix des résidents à qui est proposé ce voyage se fait en équipe pluridisciplinaire, selon son plan de soin et son projet personnalisé.
Des résultats probants pour la casa di reposo italienne, qui ont conduit plusieurs établissements français à tester le dispositif à leur tour.
Expérimentations françaises
L’Ehpad Notre-Dame de la Treille, à Valenciennes, a opté pour la solution italienne.
Le service de gériatrie du CHU d’Amiens a quant à lui conçu un dispositif similaire avec une entreprise française, Sigo Healthcare, qu’il a expérimenté auprès de 42 personnes.
Une expérimentation qui a débouché sur un poster présenté lors du dernier congrès de la SFGG par le Pr. Frédéric Bloch, chef du service de gériatrie.
De bons résultats… à financer
Selon ses résultats, la thérapie du voyage aide les utilisateurs à se détendre (58,3 % des personnes étaient détendues avant la session contre 87,5 % à la fin du voyage), et présente une bonne acceptabilité puisque seule une personne a arrêté en cours de séance, et 79,2 % des utilisateurs ont adhéré au scénario.
Des améliorations qui ont un coût : autour de 50 000 euros pour la solution italienne, et 22 000 pour celle de Sigo Healthcare, qui a embauché une chargée de partenariat afin d’aider les établissements à financer le projet en levant des fonds auprès de fondations ou de mécènes.
Et l’éthique ?
Se pose aussi la question de l’éthique : faut-il mentir aux personnes souffrant de troubles cognitifs ?
« Cette médiation, comme toute médiation faisant partie des thérapies non-médicamenteuses, n’est pas faite pour tromper la personne », répond Julie Ernecq, psychomotricienne au CHU.
« L’idée n’est donc pas de “mentir” mais simplement de proposer une médiation adaptée. Il suffit d’accueillir ce que nous exprime la personne qui vit sa propre expérience, avec l’attention bienveillante et rassurante de l’accompagnateur (…) De toutes les manières, en cas de troubles neuro-cognitifs assez importants, les personnes atteintes vivent une réalité qui leur est propre et que nous nous devons de respecter et d’accompagner dans le sens de la validation des émotions, l’empathie, la bienveillance et la réassurance. »