Connaître vos droits
Violences conjugales : les femmes âgées en première ligne


Si les violences faites aux femmes sont enfin devenues un sujet, les femmes âgées en revanche passent complètement en dessous des radars. L’étude Cadre de vie et sécurité du ministère de l’Intérieur, par exemple, ne prend pas en considération les femmes de plus de 75 ans. Au lendemain de la journée internationale des droits des femmes, gros plan sur une enquête aux résultats édifiants, qui montre que les femmes seniors sont plus exposées que les autres à la plupart des violences conjugales.
Violences psychologiques, physiques, verbales, économiques… L’enquête, menée auprès de plus de 4 000 femmes par Opale Care (plateforme pour les victimes de violences dans le couple), montre ainsi que les femmes de plus de 60 ans en couple hétérosexuel sont les premières victimes de presque toutes les formes de violences conjugales.
Seules exceptions, les violences numériques, ou cyberviolences, où la part de victimes âgées est bien en dessous de la moyenne nationale, en raison sans doute d’un moindre usage des nouvelles technologies et des réseaux sociaux dans cette tranche d’âge.
Mais aussi les violences sexuelles : 61 % des répondantes en seraient victimes contre 62 % pour la moyenne tous âges confondus. Un chiffre à prendre toutefois avec des pincettes dans la mesure où les femmes de cette génération sont souvent moins sensibilisées à ce sujet : n’oublions pas que le viol conjugal a été reconnu comme un crime en France qu’en 1990 (Cour de cassation, décision du 5 septembre 1990).
Pour le reste, les femmes âgées ayant répondu à l’enquête sont :
• 94,35 % à subir ou avoir subi des violences psychologiques au sein de leur couple, contre 90,02 % de moyenne nationale ;
• 74 % pour les violences physiques (+ 5 points) ;
• 71 % pour les violences vicariantes, c’est-à-dire qui impliquent les enfants (+ 11 points) ;
• presque 59 % pour les violences verbales (+ 12 points) ;
• 39 % pour les violences économiques (+ 8 points).
Une surreprésentation des femmes âgées sur laquelle alertaient déjà Les petits frères des pauvres le 8 mars 2024. Pour l’association, elle s’explique par plusieurs facteurs : le manque de sensibilisation des femmes âgées sur le sujet, l’emprise du conjoint, qui peut remonter à des décennies et donc s’avérer particulièrement difficile à briser, la maladie ou la perte d’autonomie qui servent d’excuses aux auteurs des violences…
Sans oublier le caractère âgiste de notre société. L’avocate Anne Bouillon expliquait ainsi en 2024 que les féminicides de femmes âgées « suscitent moins de colère collective car on s’identifie moins aux victimes. Il y a cette idée que la mort a juste pris un peu d’avance […] on accorde moins de valeur aux femmes âgées qu’aux plus jeunes ».
Il y a donc fort à faire en matière de droits des femmes âgées. Pour leur sécurité, mais pas seulement : au croisement de l’âgisme et du sexisme, les inégalités en matière de santé et de précarité notamment ont la vie dure.
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