Aller sur la navigation Aller au contenu principal Aller sur la recherche

Connaître vos droits

Nous ne sommes pas des jouets (Lucienne, 90 ans)

Auteur Rédaction

Temps de lecture 2 min

Date de publication 22/07/2024

0 commentaires

Lettres d’anciens jeunes à de futurs vieux

Même très vieux, on a une opinion sur la marche et l’évolution du monde, même vieux, on peut rester en prise avec son temps, même vieux, on reste en position de donner, de recevoir et d’affirmer. Pour preuves, ces lettres – authentiques – « d’anciens jeunes à de futurs vieux », qu’agevillage republiera au fil des mois. Cette semaine, Lucienne, 90 ans, écrit à ses enfants qui ont choisi de la faire entrer en Ehpad, car c'est « ce qu'il y avait de mieux pour [elle] ».

Chers enfants,

Je vous remercie de m'avoir mise à l'abri de tout souci.

La propreté de la maison de retraite est remarquable. J'ai trouvé une bonne ambiance et un personnel charmant.

Cela fait maintenant quatre ans que je vis ici, quatre ans que je suis arrivée sans l'avoir choisi.

Je sortais d'une hospitalisation en cardiologie, et je pensais rentrer chez moi, dans mon pavillon. Hélas, vous avez choisi « ce qu'il y avait de mieux pour moi », à votre avis. De mes meubles, vous avez eu la gentillesse de me donner deux chaises, ma panetière, une commode, et un meuble avec une télévision pour aménager mon « studio ». Je ne sais absolument pas ce qu'est devenu le reste. Si, mon buffet est, paraît-il, en Amérique.

J’étais, à l’époque, complètement désemparée. Je vous ai ainsi facilement donné procuration. J'espère que vous gérez bien mon argent. Je n'en ai aucune nouvelle, mais je vous fais confiance.

J’ai vécu dans mon pavillon soixante-quatre ans, et vous ne m’avez pas demandé mon avis, ne serait-ce que pour lui dire un dernier « au revoir ». Je pleure encore très souvent la nuit, car je dors peu et pense beaucoup à mon ancienne vie, mes souvenirs. Parfois, je rêve même que j’habite encore ma maison. Le plus dur est de se réveiller.

Vous qui êtes dans mon cas, prenez patience, et occupez-vous (dessin, tricot…) : ça ne vous fera pas oublier, mais ça fera passer chaque journée plus vite.

Surtout, je voudrais dire aux familles : informez et discutez avec vos parents. C’est leur vie que vous manipulez.

Nous ne sommes pas des jouets. A notre âge, nous prenons tout à cœur, un rien nous fait du mal. Alors s’il vous plaît, ne nous considérez pas comme des pantins dénués de sentiment dès que nous commençons à être « encombrants ». Parlez-nous, laissez-nous être encore un peu acteurs dans notre vie.

Merci.

En savoir plus sur le projet « Lettres à… »

Partager cet article
Tags