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Trouver son lieu de vie

Nous, les vieux, on attend toujours (des femmes)

Auteur Rédaction

Temps de lecture 3 min

Date de publication 06/01/2025

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Lettres d’anciens jeunes à de futurs vieux

Même très vieux, on a une opinion sur la marche et l’évolution du monde, même vieux, on peut rester en prise avec son temps, même vieux, on reste en position de donner, de recevoir et d’affirmer. Pour preuves, ces lettres – authentiques – « d’anciens jeunes à de futurs vieux », qu’agevillage republiera au fil des mois. Cette semaine, un courrier écrit par un groupe de femmes, qui rêvent à ce qu'elles ont perdu.

Lettre au personnel, aux familles.

Il ne nous était jamais venu à l’idée, lorsqu’on était plus jeune, qu’un jour nous atterririons dans une maison de retraite pour les vieux. Nous pensions finir nos jours, comme nos parents, en famille, bien entourés, avec notre chien, notre chat ; nous n’imaginions pas plus que notre compagnon de vie partirait si longtemps avant nous. La mort se sert, elle emmène qui bon lui semble sans autorisation, c’est une voleuse de vie quand on est encore pas vieux, et on l’attend quand on en peut plus.

Le premier pas, vers ce qui est la fin d’une vie, qu’il faut regarder en face pour ne pas trop souffrir. Quand on arrive en maison de retraite, on se sent seule, perdue, abandonnée, livrée tel un paquet à des gens, trop de gens, on ne les connaît ni reconnaît. Ils savent tout, et en même temps, rien de nous. On se sent comme un vieux fauteuil que l’on déplace quand on fait le ménage.

Et puis il y a les visites, un peu plus rares avec le temps. Les gens disent : « Vous êtes bien dans cette maison, vous avez tout ce qu’il vous faut, vous voilà tranquille maintenant. » On ne veut pas être tranquille, on veut vivre, rire, chanter la vie, on a le cœur qui bat comme vous tous.

Le personnel est nombreux, il nous semble, mais souvent n’a pas le temps : « Il n’y a pas que vous à s’occuper. » Comme nous les vieux, il y en a des gentils et des bien moins, nous sommes vieux mais nous ne voulons pas devenir transparents.

La direction, on la voit peu. Quand elle vient, c’est quelqu’un de chaleureux, on apprécie son bonjour.

La nourriture, c’est correct, mais nous ne rêvons pas forcément de ce qui nous « tombe » dans l’assiette.

Il faut trouver un fil pour s’accrocher à cette vie qui nous reste, se reconstruire une chez nous avec quelques souvenirs, photos, bibelots, livres, tableaux. Cela ne représente pas une vie. « Tu ne vas pas t’encombrer de ces vieilleries », comme nous, des vieilleries.

Dans un coin de notre cœur, de notre mémoire, on entasse tout ce qui a fait notre vie. On s’étonne après que l’on ait plus de mémoire, il n’y a plus de place, c’est tout.

Vous qui vous occupez de nous, qui nous soignez, nous prenez en charge vingt-quatre heures sur vingt-quatre, quand vous rentrez chez vous, après votre journée, vous retrouvez la vie, la vraie, avec ses joies et ses peines. Nous, les vieux, on attend toujours, on rêve à tout ce que l’on a perdu.

Regardez-nous ! Comme vous, on a été jeune, comme vous, on a travaillé, élevé les enfants, soigné nos amis à quatre pattes. Comme nous un jour, c’est vous qui serez là à notre place, à attendre un sourire, un mot gentil qui réchauffe le cœur et embellit notre journée. N’oubliez jamais que nous sommes toujours vivants, même si vous n’avez pas le temps, regardez-nous, nous sommes le miroir de vous tous.

Rassurez-vous, il y a de bons moments, ici on peut rire aussi, chanter, rêver, ne soyez pas pressés d’y venir.

En savoir plus sur le projet « Lettres à… »

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