Comprendre les fragilités
MCL : rencontre avec Philippe de Linares, président de l'Association des aidants et malades à corps de Lewy
Plus de 150 000 personnes sont atteintes en France de la maladie à corps de Lewy (MCL). Une maladie encore trop méconnue, aussi bien par le grand public que par les professionnels de santé, rendant souvent compliqué son dépistage. Au lendemain du colloque organisé par l'Association des aidants et malades à corps de Lewy, son président Philippe de Linares propose des pistes pour améliorer l’accompagnement des malades.
Le 26 novembre dernier, gériatres, psychologues, neurologues, spécialistes de la maladie à corps de Lewy… s’étaient donné rendez-vous à l’hôpital marseillais de la Timone à l’occasion d’un colloque dédié à cette maladie méconnue.
Une pluridisciplinarité essentielle dans l’accompagnement de la maladie selon le président de l'Association des aidants et malades à corps de Lewy (A2MCL) qui précise que chacun des intervenants au colloque ont insisté sur “les effets délétères de la méconnaissance de la maladie”.
“Nous recevons tous les jours des appels de personnes qui nous racontent que leur proche semble avoir les critères correspondant à la maladie à corps de Lewy mais que le médecin les oriente plutôt vers Alzheimer ou Parkinson.”
Selon Philippe de Linares, un tiers des généralistes ne connaît pas la maladie à corps de Lewy et un autre tiers la considère comme une maladie apparentée.
“Certains médecins considèrent que s’il n’y a pas de syndromes de Parkinson, alors il ne peut pas s’agir de la maladie à corps de Lewy. C’est complètement faux.”
Face à cette méconnaissance, Catherine Laborde, marraine de l'association A2MCL et elle-même atteinte de la maladie, participe activement à faire connaitre les spécificités de cette pathologie complexe pour permettre un accompagnement adapté.
Pour rappel, la démence à corps de Lewy est une maladie neurodégénérative aux symptômes multiples et fluctuants : dépression, troubles cognitifs, hallucinations et délires, raideurs et parfois tremblements…
Attention aux risques d’orages
Le président de l'A2MCL alerte aussi sur les changements d’humeur, caractéristiques de la maladie et souvent très compliqués à appréhender pour les aidants.
“Les malades développent une hypersensibilité et une forte anxiété mais conservent toute leur lucidité. Ces fluctuations permanentes sont très difficiles à gérer pour l’entourage, il faut les considérer comme des orages successifs et prendre des dispositions pour les prévenir.”
Si toutes les activités physiques, intellectuelles, artistiques peuvent être bénéfiques pour le malade, Philippe de Linares conseille cependant d’apporter une attention particulière au moment choisi pour les pratiquer et de s’adapter au mieux à l’humeur de son proche.
Ainsi, lorsque son proche semble dans une bonne phase, il conseille de lui proposer des activités tout en prenant les dispositions nécessaires, en prévision de moments plus difficiles. “Il faut profiter des bons moments et faire les choses dans un grand calme.”
Comment améliorer l’accompagnement ?
Faire connaître la maladie à corps de Lewy reste la priorité pour permettre un meilleur accompagnement, et le président de l'A2MCL souhaiterait une meilleure formation des professionnels de santé. “Tous les soignants ont besoin d’une formation spécifique pour être alertés sur les possibilités de cette maladie.”
“Nous militons aussi pour qu’il y ait au moins deux centres experts en France, qui pourraient former d’autres centres de compétences un peu partout sur le territoire” poursuit Philippe de Linares
Le 10 décembre prochain, le ministère des Solidarités et de la Santé organisera un séminaire pour partager les résultats des travaux autour de la feuille de route maladies neurodégénératives 2021-2022.
Feuille de route qui devrait enfin inclure la maladie à corps de Lewy, aujourd’hui toujours considérée comme une maladie apparentée.
“Si on peut faire écrire dans le plan maladies neurodégénératives (MND) que la maladie à corps de Lewy est une maladie à part entière, alors on aura déjà fait un grand pas en avant” précise Philippe de Linares.
Une reconnaissance qui devrait permettre un meilleur dépistage de la maladie et un meilleur accompagnement. Pour rappel, à ce jour, la maladie à corps de Lewy n’existe pas pour la Sécurité sociale et aucune ALD (affection longue durée) spécifique n’a été imaginée.
“Il faut en finir avec la confusion entre la maladie à corps de Lewy et Alzheimer ou Parkinson” conclut le président de l'A2MCL.