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Scandales en Ehpad et services à domicile : 3 pistes d'explications et d'actions pour aider à vieillir debout
Les Ehpad et services à domicile étaient à nouveau sous le feu des projecteurs avec la réédition ce 25 janvier de l'enquête choc de Victor Castanet sur les Ehpad Orpea et Zone Interdite ce 29 janvier qui a pointé autant les dysfonctionnements dans les Ehpad que les services à domicile du groupe privés. Reste la tension entre les attentes et besoins des plus âgés en situation de vulnérabilité, de leurs proches aidants et le manque de moyens, de professionnels du prendre soin quel que soit le secteur d'activité (public, privé, associatif). Voici trois pistes d'explications à ces scandales auxquels le ministre des Solidarités, de l'Autonomie et des Personnes handicapées, Jean-Christophe Combe s'est engagé à remédier.
1ere explication / action : dépasser les difficultés à dénoncer l’inacceptable
C'est le président du 3977 (Allô maltraitance des plus âgés) qui le dit dans Zone Interdite : il est très difficile de dénoncer des maltraitances quand aucune alternative n'est disponible (pas de place, pas de service disponible) alors que les besoins d'aides s'accroissent et que les proches aidants ne peuvent plus faire face 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7.
La peur des représailles contre le proche vulnérable est terrible, souligne Pierre Czernichow qui a vu les appels au 3977 exploser avec 40 000 appels.
Sans oublier les pressions des acteurs eux-mêmes, des groupes puissants qui défendent coûte que coûte leurs intérêts, comme en témoigne le journaliste Victor Castanet dans les 10 chapitres de la version augmentée de son livre Les fossoyeurs, réédité aux éditions J'ai lu. Il raconte les sondages truqués, les intimidations, les attaques de sociétés spécialisées dans l'e-réputation…
Le livre a libéré la parole. Aux pouvoirs publics de permettre des signalements et leur suivi, de sortir du déni sociétal.
Le ministre des Solidarités, de l'Autonomie et des Personnes handicapées, Jean-Christophe Combe, a annoncé la semaine dernière l'ouverture prochaine d'une plateforme en ligne de dépôt et traitement des plaintes, réclamations, signalement en lien avec les Agences régionales de santé (ARS). Elles sont chargées des contrôles des Ehpad : 1400 ont déjà été contrôlés, majoritairement des établissements privés commerciaux. 1794 recommandations et injonctions ont été édictées et 11 saisines au procureur de la République pour des infractions pénales.
Le ministre va aussi lancer des états généraux de lutte contre la maltraitance des adultes en situation de vulnérabilité pour renforcer la structuration des alertes, des suivis, la culture de la bientraitance auprès de tous les acteurs (citoyens, professionnels, pouvoirs publics).
2eme explication/action : le manque de moyens, de professionnels vers un taux d’encadrement opposable ?
Les reportages, les enquêtes médiatiques, les rapports officiels depuis la grande grève de 2018 dans le secteur du grand âge... tous dénoncent un secteur sous l'eau, en sous effectif chronique au regard des besoins en aides et soins quotidiens, 24 heures sur 24, 7 jours sur 7.
Ce manque d'attractivité se constate dans toutes les structures (établissements, domicile), quel que soit le statut (public, associatif, privé) avec des taux d'encadrement et de rémunération plus faibles dans le secteur privé commercial malgré des tarifs élevés (ce qui aggrave encore l'incompréhension des citoyens).
Même la Cour des comptes reconnait que le secteur est en sous-effectif par rapport aux besoins. Au regard des coûts de la non-qualité (accidentologie énorme du secteur, absentéisme, coûts des remplacements), la Cour estime qu'un investissement d'une dizaine de milliards d'euros mis en avant dans plusieurs rapports (Libault en 2019 notamment) est nécessaire.
Tous les acteurs saluent le récent avis de la Défenseure des droits, exaspérée du manque de suivi de ses recommandations pour un taux d'encadrement opposable en Ehpad : passer de 6 à 8 professionnels pour 10 habitants, dont une majorité de soignants et des profils "vie sociale", psychologues, restauration (pour lutter contre la dénutrition).
Les cinq premiers indicateurs choisis par le ministère pour éclairer sur la qualité des Ehpad n'ont pas retenu ce taux d'encadrement, notamment "parce que le secteur ne parvient pas à recruter" estime le ministre Jean-Christophe Combe.
Il prévoit que cet indicateur sera défendu dans les prochains véhicules réglementaires, comme le projet de loi pour bien vieillir en France, porté par les députés de la majorité. C'est aussi une demande qui remonte des consultations du CNR Bien vieillir (Conseil national de la refondation).
3eme explication/action : clarifier le financement des Ehpad, leur tarification et moraliser les pratiques
Difficile de comprendre qu'un établissement cher n'apportera pas une qualité de prise en soin pourtant promise, "faute de financements publics".
Difficile de comprendre que des établissements moins chers garantiront le respect de 500 critères de bientraitance comme ceux du label Humanitude.
Le syndicat des maisons de retraite privées a lancé une charte d'engagement et des groupes ont évolué en sociétés à missions.
Mais Jean-Christophe Combe n'est pas dupe d'un potentiel affichage non suivi d'effet.
Il va travailler avec les équipes de Bercy au ministère des Finances autour de la loi Pacte pour renforcer les critères, les indicateurs, pour allier performance et qualité de prise en soin.
Les professionnels pointent aussi les pièges des modes de financements actuels centrés sur les besoins en aides et soins (grilles Aggir : GMP et Pathos : PMP). Si les structures améliorent la prévention santé, l'autonomie fonctionnelle des habitants remis debout, jusqu'au bout, ces derniers peuvent même être pénalisés puisque les établissements recevront des dotations financières inférieures.
C'est la vision de ces établissements qui est à revoir. Ils pourraient devenir de véritables centres de ressources pour l'autonomie, dotés de professionnels aux métiers porteurs de sens, formés, compétents, managés pour assurer une qualité de prise en soin, debout jusqu'au bout, pour une société pour tous les âges.
Cela demandera une structuration, une gouvernance revue, lisible avec des services publics de l'autonomie identifiés qui orienteront vers ces services experts labellisés, rassurants.
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