Comprendre les fragilités
Beaux, pratiques : quand les vêtements s’adaptent à la perte d’autonomie
Quand une perte d’autonomie, un handicap survient, s’habiller peut vite devenir compliqué. Or cet acte du quotidien est essentiel, pour cacher sa nudité et se protéger du froid bien sûr, mais surtout pour maintenir son identité, son estime de soi. S’il existe aujourd’hui des lignes de vêtements adaptés, des bénévoles, des entrepreneuses vont plus loin en proposant de modifier les propres vêtements des personnes en perte d’autonomie pour les rendre plus faciles à vivre.
Ces dernières années, des marques spécialisées ont vu le jour et proposent des gammes de vêtements ergonomiques, faciles à enfiler, compatibles avec un fauteuil roulant ou même une perfusion, comme Habicap ou Forestime. Un vrai soulagement pour les personnes malades, en perte d’autonomie et leurs aidants.
Des marques classiques commencent elles aussi à lancer des gammes inclusives : l'enseigne de vêtements pour homme Jules, Tommy Hilfiger, qui propose des pièces pour hommes, femmes et enfants dans sa ligne Adaptative, Kiabi et sa gamme facile à enfiler... Le géant de la chaussure de sport Nike a même sorti des modèles à passer sans les mains (modèle Go fly Ease).
Chaque année, le choix s'élargit un peu plus… mais encore faut-il trouver dans leurs catalogues des pièces qui plaisent.
Lancée en 2017, l’initiative Bien à porter vise à recenser, dans les enseignes de prêt-à-porter généralistes, des vêtements faciles à mettre et agréable à porter.
Le site propose deux sélections, la première proposée par les utilisateurs, et la seconde repérée et validée par une équipe composée d’un ergothérapeute, d'une aide-soignante, d'une patronnière et de testeurs de vêtements directement concernés par des contraintes physiques ou fonctionnelles.
A l’hôpital gériatrique Bretonneau, à Paris, l’association Eglantine propose depuis 2012 aux patients, notamment en séjour de longue durée, d’adapter leurs vêtements pour les rendre plus pratiques, grâce à un atelier couture où des bénévoles ajoutent boutons pression, velcros et autres attaches dans le dos…
« C’est très difficile de voir son proche à moitié dénudé dans son fauteuil, ou habillé de l’éternelle casaque hospitalière », nous confiait en 2018 Colette Marcotorchino, la présidente de l’association. « Nous réadaptons chaque garde-robe sans dénaturer le vêtement. Nous proposons aussi une ligne de vêtements qui redonne immédiatement une meilleure estime de soi. Avoir son proche bien habillé soulage aussi les familles, les proches. Cela nous donne encore plus envie de sortir, d’aller boire un verre ou déjeuner au restaurant. »
Un service gratuit, pour permettre au plus grand nombre d’en profiter, mais forcément limité.
Yaëlle Duigou, Clémence Mastain et Léa Terrassin espèrent pour leur part rendre accessibles ces adaptations personnalisées à tous ceux qui en ont besoin.
Les trois jeunes femmes ont lancé il y a quelques mois Ladaptelier, une entreprise de transformation des vêtements. Le projet a été construit avec le groupe hospitalier de Loos-Haubourdin, explique Léa Terrassin.
« Nous travaillons avec des couturières professionnelles, et les systèmes d’ouverture et fermeture sont préparés par des Esat ».
Après un crowdfunding (financement participatif) réussi – elles ont récolté 3 115 euros, soit 155 % de leur objectif - qui leur a permis d'adapter une quarantaine de vêtements appartenant à des résidents d’Ehpad, elles ont lancé leur site, Ladaptelier.fr, en avril.
Il est possible de commander des adaptations depuis toute la France. Une fois le type d'adaptation choisi et la commande passée, les clients reçoivent un bordereau d'envoi pour faire parvenir le vêtement à l'atelier. Une fois transformé, il sera réexpédié chez son propriétaire. En cas de doute, de question, les clients peuvent joindre les équipe de Ladaptelier au 07 57 02 20 74.
Les prix sont de 30 euros en moyenne et varient selon le type de vêtement et le système d'attache choisi. Certains Ehpad, intéressés par la démarche qui facilite tant la vie des résidents que celle des salariés, se disent prêt à financer l’adaptation de trois à quatre pièces par résident, et cherchent des financements en ce sens, confiait Léa Terrassin en début d'année.
Pour des vêtements beaux, pratiques et accessibles... pour tous.
