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Affaire Orpea : l’État saisit la justice et exige le remboursement de financements publics
Deux mois après la publication de son livre-enquête Les Fossoyeurs sur le groupe Orpéa, le journaliste Victor Castanet a été applaudi au Salon des Seniors à Paris lors d'une conférence sur les Ehpad (établissements pour personnes âgées dépendantes). L'onde de choc du livre a déclenché des auditions très suivies à l'Assemblée nationale et au Sénat. Ce 26 mars, les conclusions des missions de contrôle de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) et de l’Inspection générale des finances (IGF) pointent des dysfonctionnements significatifs au point que l’État a décidé de saisir la Justice et demande le remboursement des financements publics irrégulièrement employés. Pour les associations de personnes âgées et leurs familles : il faut publier les rapports et accélérer les réformes.
Des dysfonctionnements significatifs et une boîte noire
Forte des conclusions des inspections de l'IGF et l'Igas menées en 6 semaines, l'État porte plainte sur la base de l'article 40 du Code pénal (dysfonctionnements graves) a expliqué Brigitte Bourguignon, ministre chargée de l'Autonomie, au micro de France Inter ce samedi 26 mars.
Les rapports attestent de manquements sur le plan humain et organisationnel (insuffisamment d'encadrants, de services, de matériels). Ils confirment que les dotations soins et dépendance destinées à financer le prendre soin des personnes en situation de vulnérabilité n'ont pas toutes été utilisées par Orpéa. Ces crédits ont servi à financer les budgets hôteliers (les agents de services) qui sont normalement à la charge de l'exploitant. Ce dernier a pu améliorer ses marges avec les financements des dotations publiques.
La ministre pointe cette "boîte noire" et va structurer la possibilité de la contrôler. Elle annonce que l'État va demander la restitution des dotations publiques de plusieurs millions d'euros en remontant avant le démarrage de l'enquête de Victor Castanet.
Brigitte Bourguignon a lancé un choc de transparence avec un plan de contrôles des 7500 Ehpad sur 2 ans dont 25 % sont privés commerciaux (230 Orpea dont 150 qui subissent actuellement un contrôle).
L'enjeu pour la ministre est de réinstaller un climat de confiance vers ces établissements et leurs professionnels soignants. La personne âgée n'est pas un produit comme un autre, a conclu Brigitte Bourguignon.
Retrouvez l'interview de Brigitte Bourguignon ce 26 mars sur France Inter
Les associations de personnes âgées et leurs familles veulent la publication des rapports et s’adressent aux candidats à la Présidence
Les associations de personnes âgées et leurs familles dénoncent le fait que les conclusions des rapports Igas et IGF ne soient pas rendues publiques pour respecter "le secret des affaires".
"Belle hypocrisie" s'étrangle Joëlle Le Gall dans le Télégramme. La présidente de Bien Vieillir ensemble en Bretagne et de la Fnapaef (Fédération nationale des associations de personnes âgées en établissements et de leurs familles) de 2004 à 2014 rappelle que "nous n’avons eu cesse de dénoncer des cas de maltraitance dans des Ehpad sans que personne ne nous entende. Déjà, à l’époque, du personnel et des directeurs d’établissement venaient nous trouver, disant qu’ils ne voulaient plus travailler dans des structures où il leur était demandé d’économiser sur les protections hygiéniques, en limitant les changes à un par jour seulement. Et le gouvernement prétend qu’il ne savait pas ? "
L'association Bien vieillir BVE.BZH a adressé un plaidoyer aux candidats à l’élection présidentielle et lancé une pétition sur change.org pour bien dire à la ministre déléguée, Brigitte Bourguignon, que l’accompagnement de la perte d’autonomie des citoyens âgés n’est pas un bien marchand.
Le Cercle des proche aidants en Ehpad (CPAE) a adressé ce 28 mars un courrier aux sénateurs qui vont auditionner la ministre Brigitte Bourguignon. Titillant son "choc de transparence", le CPAE pointe l'article du Journal du dimanche qui indique que le Gouvernement ne lancera pas d'enquêtes administratives centralisées sur d'autres sociétés concurrentes (à Orpea). Or des groupes comme Korian et Domus Vi ont été pointés par des médias (Cash Investigation notamment) et lors de nombreux témoignages qui ont suivi la déflagration du livre Les Fossoyeurs. Le Cercle des proches aidants en Ehpad s'insurge contre cette inertie et l'absence de publication des rapports Igas/IGF, qu'ils qualifient d'omerta.
Enfin la Fnapaef va s'adresser aux candidats à la Présidence ce 1er avril 2022 de 15h30 à 17h30 en webconférence.
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