Trouver son lieu de vie
Edito : Faut-il supprimer les maisons de retraite ?
Pour quelles alternatives ?
Voilà une drôle de question, qui circule sur les réseaux sociaux , dans les médias (Courrier international) et les plateaux de télévision (Magazine de la santé sur France 5/Allo docteur).
Il est vrai que l'image de ces maisons de retraite, ces mal nommés EHPAD (Etablissements pour personnes âgées dépendantes), en a encore pris un coup avec la crise sanitaire.
Le décompte macabre des morts chaque jour à la télévision était à peine compensé des applaudissements aux professionnels de terrain.
Les ministres chargées de l'autonomie et de l'insertion, mesdames Bourguignon et Klinkert ont justement rendu visite à ces équipes. Elles ont choisi rendre hommage à des professionnels d’établissements et de services à domicile du Grand Est, qui ont particulièrement souffert (décès de résidents et d'une aide-soignante), mais n’ont pas déserté et sont venu prendre soin chaque jour des plus malades.
Alors pourquoi cette question : faut-il supprimer les maisons de retraite ?
Parce qu’on ne veut y entrer ? Souhaite-t-on entrer dans un service de réanimation ? Non, et pourtant nous comptons sur eux ! Il en est de même quand la maladie s'aggrave, que le besoin d'aides, de présences professionnelles, devient nécessaire 24 heures sur 24 avec une qualité de prendre soin qui permet d'éviter les troubles du comportement et de continuer à bricoler sa vie, son projet d'accompagnement personnalisé.
Parce qu’on n’y est plus en danger ? Alors pourquoi demander que ces solutions se développent quand le domicile n’est plus adapté à la maladie, au handicap ? Pourquoi ne pas investir plus avant ces lieux pour qu'ils nous rassurent, pour que nous en soyons fiers ? Peur de la mort, âgisme, rejet de la grande vieillesse ? C'est trop facile de rejeter la pression sur les autres, et notamment les professionnels en première ligne. Que vouslons-nous pour nos parents aujourd'hui, pour nous demain ?
Parce qu'ils sont trop chers ? Ils sont surtout "mal remboursés" expliquent les professionnels car ils relèvent beaucoup du besoin en présences continues, en soins, en accompagnements professionnels en plus de l'hébergement, de la restauration, de l'entretien. Ils sont majoritairement publics, puis associatifs, puis privés commerciaux. Mais l'Etat n'a pas décidé de quotas de personnels opposables ni de référentiel qualité. A ce jour, des labels issus des professionnels eux-mêmes visent à valoriser les métiers, les pratiques et la qualité de vie.
Parce qu’on n’y est pas bien traité ? La encore, pourquoi l’accepter ? Pourquoi ne pas mettre en œuvre les réponses ajustées, demandées par les professionnels eux-mêmes en termes de moyens, d’équipes suffisantes, formées, managées, 24 heures sur 24, 7jours sur 7 comme dans les accueils collectifs des autres cistoyens (les plus jeunes notamment) ? Pourquoi accepter des injonctions contradictoires : défendre la liberté de vivre des habitants (en bon babyboomers), affirmer l'importance vitale du lien social pour vivre (bien vieillir) et accepter leur confinement strict ? Manger seul, à l'isolement... Ca peut faire glisser. C'est très difficile de ne pas pouvoir se toucher, s'embrasser ... au long cours.On protège, on se protègen, on fait attention et on tente de vivre, au mieux.Ecoutez le magazine Interception ce dimanche 6 septembre sur France Inter.
Les ministres en visite ont insisté sur le nécessaire professionnalisme indispensable pour préserver l'autonomie des personnes fragilisées, malades.
Oui on peut vivre et mourir debout en maison de retraite. Nous connaissons les techniques, les savoir-faire adaptés. Encore faut-il que notre société partage cette vision porteuse de sens, de souffle et de motivation pour les personnels et qu'elle se donne les moyens de déployer cette ambition. La trentaine d'établissements labellisés Humanitude l’attestent tout en reconnaissant le professionnalisme et les efforts continus que cela demande.
Ils se battent pour défendre une qualité de prendre soin qui évite les risques de dénutrition en plein confinement, qui mobilisent les proches aidants (eux aussi souvent transformés en professionnels en première ligne pendant la crise sanitaire), Ecoutez cette semaine ces podcasts auprès d'aidants en activité. Voir aussi cette semaine cette boite à outils pour les proches de malades Alzheimer, ou le joli film « Remerber me » sur grand écran. Et comme la pandémie se poursuit, de nouvelles mesures sont activées pour les personnes les plus à risque.
A nous de décider d’être fiers des maisons de retraite. Pour nous, pour nos proches qui choisissent d'y entrer (j'ai une forte pensée pour ma maman) ou que nous confions (forte pensée pour ma belle-maman). Même très fragilisées, même très malades, l'autonomie des personnes est écoutée, entendue, respectée. Leur participation à la vie quotidienne est favorisée, pour les aider à vivre, vieillir et mourir debout, jusqu'au bout, malgré tout. Et pour aider aussi les professionnels de terrain à être fiers de leurs magnifiques métiers du lien.
Plutôt que de supprimer ces maisons de retraite, transformons-les, donnons-leur les moyens d'être des "lieux de vie – lieux d’envies", pour y vivre et mourir debout, comme le dit le label Humanitude (1er label de bientraitance). Inventons, développons ces plateformes gérontologiques rassurantes sur les territoires et travaillons aussi des projets alternatifs, des formes d’habitats inclusifs ou le relayage à domicile.
Avec ce satané virus qui est toujours là.
C’est possible d'être fiers de ces solutions et ce sera positif pour la qualité de vie des plus âgés, de leurs proches aidants, mais aussi pour la qualité de vie au travail des professionnels de terrain.
Il y a urgence étant donné l'arrivée prochaine des babyboomers aux âges où la fragilité peut s'installer et l'entrée en structure spécialisée s'envisager.
A nous de créer, de transformer plutôt que de supprimer !
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