Comprendre les fragilités
Edito : tous confinés comme les vieilles personnes fragilisées
Vivre leurs ressentis pour mieux les accompagner aujourd’hui et demain
La crise sanitaire contre l'épidémie du Covid-19 oblige tous les citoyens, de tous âges, à vivre confinés chez eux.
Tous confinés dans un espace réduit, avec un rayon d'action d'un kilomètre maximum (500 mètres pour les plus âgés fragilisés), avec accès à un jardin pour les plus chanceux, le tout dans un logement qui lutte aussi contre le virus (voir les conseils pratiques d'hygiène : les produits, les précautions).
Tous confinés et parfois seuls, isolés, avec les conséquences délétères que l'on connaît. On compte 900 000 personnes âgées en très grand isolement en France.
Notre confinement collectif nous fait prendre conscience du besoin viscéral de regards, de touchers, de liens.
Le rapport de Jérôme Guedj contre l'isolement rappelle cette semaine cette réalité qui n'est jamais une priorité des politiques publiques. Il demande le déploiement de gestes solidaires aussi forts que le déploiement des gestes barrières contre le virus. Et en premier lieu : téléphonez, téléphonez, téléphonez autour de vous ! Voir aussi toutes ces ressources, ces initiatives pour maintenir le lien.
D'autres citoyens confinés sont malades. Ils cherchent en eux, auprès de leurs pairs, chez leurs proches ces ressources. Voir cette semaine, le lancement de la plateforme Dopamine Care par France Parkinson à l'occasion de la journée mondiale Parkinson le 11 avril. Voir aussi les conseils des pyschologues de l'Institut de la mémoire et de la maladie d'Alzheimer pour rassurer les malades.
Certains sont confinés à deux, à plusieurs. Et là encore, la créativité, les liens, la présence seront appréciés à leur juste valeur. Surtout s'ils sont soutenus par des réseaux d'aide de proximité. (voir cette semaine les arrêts maladies étendus aux proches aidants). Mais attention au huis clos qui peut aussi devenir dangereux.
Et ce confinement va se poursuivre nous a expliqué le Président de la République ce 13 avril, jusqu'au 11 mai et sûrement au-delà pour les personnes âgées, "pour les protéger". Ce qui pose questions donné les premières conséquences du confinement soulignés par la Société Française de Gériatrie et Gérontologie (SFGG) : anorexie et amaigrissement, déclin cognitif accéléré, majoration de troubles du comportement, tristesse …
On le voit, cette épidémie, cette exigence de confinement, font apparaître nos faiblesses, nos besoins pré-existants, sous-jacents : un manque de politiques de préventions concrètes sur tous les territoires, le manque de visibilité des recours (HAD, SAU, unités de soins de médecine ou de SSR, équipes mobiles gériatriques ou de soins palliatifs), le manque de professionnels formés, compétents, en nombre suffisant, le manque de moyens de détection et de protections (d'où le déploiement du système D avec cette semaine notre sélection de tutos et conseils pour confectionner des masques).
Chacun, confiné, ressent au fond de lui ce que veut dire que vivre fragilisé, avec des liens sociaux limités. Les artistes sensibles à ces enjeux sont nombreux à se mobiliser pour remercier les soignants et comme Michel Drucker pour dire "Stop à l'isolement des plus âgés".
Est-ce que ces prises de conscience changeront nos regards, nos attitudes, nos priorités envers les plus âgés (nous demain) ?
En tous cas ces derniers qui se sont adaptés toute leur vie, témoignent aujourd'hui de leur capacité d'ajustement. De leurs colères et de leur anxiété aussi.
Et ils veulent participer concrètement, en citoyens, à la société de l'après, qu'il faudra réinventer !