Soupçonné d'euthanasie active sur des patients âgés, un médecin urgentiste de Bayonne mis en examen puis relâché
“Empoisonnement” sur personnes vulnérables
Le médecin soupçonné d'euthanasie active sur au moins quatre patients âgés au service des urgences de l'hôpital de Bayonne a été mis en examen vendredi 12 août pour "empoisonnement" sur "des personnes particulièrement vulnérables"et remis en liberté sous contrôle judiciaire. Le parquet, qui avait requis son placement sous mandat de dépôt, a annoncé son intention de faire appel de la décision de remise en liberté.
Parmi les conditions du contrôle judiciaire du prévenu figurent l'interdiction d'exercer sa profession, l'interdiction de rencontrer les
personnes concernées par les faits, ainsi que les membres du personnel de l'unité hospitalière où il travaillait, a précisé M. Mariée, après l'annonce de la remise en liberté.
Le procureur-adjoint de Bayonne, Marc Mariée, a fait savoir au cours d'une conférence de presse qu'il avait remis le dossier à deux juges d'instruction "compte tenu de la complexité du dossier" et que le parquet avait demandé le placement sous mandat de dépôt du médecin.
Selon M. Mariée, la justice reproche au médecin, Nicolas Bonnemaison, 50 ans, du services des urgences de l'hôpital de Bayonne, d'avoir pratiqué des injections de "substances ayant entraîné le décès immédiat" d'au moins quatre personnes âgées.
La mise en examen a trait en premier lieu à quatre décès survenus au cours des cinq derniers mois, le dernier étant celui d'une patiente de 92 ans, morte le 3 août. Selon son avocat, M. Bonnemaison "ne regrette pas son geste et a préféré prendre le problème (de l'euthanasie) à bras le corps".
Le médecin "n'a pas démenti les faits, il a expliqué les circonstances de décisions prises face à sa conscience pour abréger les souffrances de personnes qui allaient décéder dans les minutes suivantes", a déclaré Me Dupin, du barreau de Bordeaux. "La notion d'assassinat est complètement absurde", a-t-il ajouté, estimant que, dans cette affaire, son client était "un bouc émissaire". Il a souhaité que "l'omerta sur ce qui entoure la fin de viesoit levée". L'euthanasie, "ça se pratique et ça existe dans tous les hôpitaux", a affirmé l'avocat, qui a demandé la remise en liberté de son client.
Le praticien, objet d'une dénonciation au sein de son service, avait été interpellé mercredi et est demeuré 48 heures en garde à vue, avant d'être mis en examen. Il encourt la prison à perpétuité. Selon le procureur-adjoint, M. Bonnemaison a notamment reconnu avoir utilisé du Norcuron, un médicament à base de curare pouvant entraîner la paralysie des muscles respiratoires.
"Il s'agit d'actes d'une extrême gravité et totalement prohibés par la loi", a déclaré M. Mariée, qui a toutefois indiqué qu'aucune des familles concernées n'avait porté plainte jusqu'à présent. Le président de l'Association des médecins urgentistes de France (Amuf), Patrick Pelloux, s'est pour sa part félicité de l'ouverture d'une enquête de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) portant sur "les conditions du décès de personnes hospitalisées" à Bayonne. Le corps médical, a-t-il dit à l'AFP, "a besoin de comprendre ce qui s'est passé".
"Tout le monde a été sidéré par cette annonce et le personnel (des urgences) a eu raison d'alerter sa hiérarchie car la médecine n'est pas au-dessus des lois", a commenté M. Pelloux. Le vice-procureur a rappelé que la loi Leonetti fixait "un cadre extrêmement strict et notamment deux conditions : celle du consentement de la personne ou de sa famille et celle de la collégialité" qui requiert les avis de plusieurs médecins.
Les quatre personnes décédées de manière suspecte à l'hôpital de Bayonne "étaient certes âgées, certes en fin de vie, mais une fin de vie peut durer plusieurs heures ou plusieurs jours" et "rien, a conclu le magistrat, ne justifie le comportement de ce médecin tel que cela a été dénoncé".
Le docteur Xavier Mirabel, cancérologue, président de l'association "SOS fin de vie", s'est dit "choqué", dans une déclaration à l'AFP.
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