Comprendre les fragilités
A lire : Le col du fémur
Michèle Declerck en a fait l’expérience : on ne peut pas être « fracassée » du dehors sans être « fracassée » du dedans. Dans Le col du fémur, roman largement autobiographique, elle raconte l’avant et l’après-chute…
« Nous venons de traverser une épaisse couche de brouillard dont émergent des applaudissements dont j’ai du mal à croire qu’ils nous soient réservés » (page 96).
Cette nappe de brouillard, c’est celle que la narratrice rencontre lors d’une course cycliste. C’est aussi celle qui a recouvert les derniers mois de sa vie.
Retour en arrière. A près de 90 ans, Michèle est en pleine forme : elle continue d’exercer son métier de psy et ne manque pas de poser un regard acerbe sur les corps de ces vieilles qui se déshabillent dans les vestiaires au club de gym, des corps « dont elles n’avaient aucune raison de se féliciter » (page 14).
« Fracassée de l’intérieur »
Mais un jour d’automne, c’est la chute. Celle dont, pense-t-elle, on ne se relève pas.
D’abord, les médecins ont l’outrecuidance de la faire séjourner en gériatrie. Mais surtout, il y a ce corps fracassé, la « décrépitude physique » (page 71), cette peur de tomber à nouveau, puis la dépression qui s’installe…
Dans ce roman court et dense, l’autrice Michèle Declerck – elle-même psychanalyste et sophrologue – conte une histoire de deuil.
De double deuil même, puisque la narratrice perd sa chatte Colombine à son retour de l’hôpital.
« Même fracassée, j’étais encore vivante »
Deux évènements inextricablement liés, deux deuils qui n’en font qu’un, qui engendrent peine et colère, haine et déni.
Mais la narratrice finira par le franchir, ce « Col du fémur ». Parce que s’il est « trop tard pour recommencer quoi que ce soit », il est « aussi trop tôt pour laisser tomber » (page 77).
Et qu’à la fin, ce qu’on emporte avec soi, « c’est la tendresse et encore la tendresse » (page 79).
Le col du fémur
Michèle Declerk
Editions L’Harmattan
104 pages
Novembre 2019
12,50 euros
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